La CGT-INRA s'adresse à tous les personnels travaillant à l'INRA

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Message du 12 janvier 2012 - version imprimable

Installations et Unités Expérimentales
- Lettre ouverte à la Direction Générale de l'INRA -

 

La Direction Générale de l'INRA a choisi dès 2006 de réduire, sans aucun réel débat scientifique, le nombre des Unités Expérimentales (UE) et de concentrer celles qui subsisteraient en dépit de toutes les conséquences négatives qui peuvent en résulter pour les personnels et les recherches INRA, en dépit du caractère fondateur et essentiel de ces activités, internationalement reconnues, pour l'identité de l'INRA.

Cette situation avait alors été dénoncée par de nombreux collègues, à l'initiative de la CGT-INRA qui a intensifié son action en 2011 en raison de nouvelles menaces (en savoir plus). En effet, avec l'intensification de la RGPP (Révision Générale des Politiques Publiques) pour réduire les moyens d'une recherche publique indépendante (1) et dans son rejet toujours plus marqué d'une gestion diversifiée des équipes, la DG a mis en place depuis fin 2010 une évolution uniforme et à marche forcée des Installations Expérimentales (IE), tout en redéfinissant les rôles de la CNUE (Commission Nationale des Unités Expérimentales). Ces évolutions diminueront les liens de ces structures avec les Unités et les Départements de Recherche pour les transformer en plateformes de prestations de service, facturées à « coûts complets », pour des projets de recherche à court terme et pilotés toujours plus par l'ANR, l'industrie (notamment via le Crédit Impôt Recherche), les régions ou la Commission Européenne.

Sur la base de critères quantitatifs indifférents au contexte et aux problématiques des Unités de Recherche (UR), la DG de l'INRA a en effet décidé de séparer la plupart des IE (> 7 agents) de leurs UR de rattachement, et de leur octroyer un nouveau statut d'UE. Cette décision, sous prétexte d'accroître la lisibilité et l'ouverture à l'extérieur aurait de nombreuses conséquences négatives sur la vie des UR comme des IE/UE :
•  perte d'autonomie dans les stratégies des UR
• complexification des procédures, accroissement des procédures bureaucratiques, perte de réactivité,...
•  affaiblissement des liens entre équipes de recherche et techniciens des IE, alors que ces liens ont déjà été mis à mal par la création de certaines TGU
•  moindres possibilités d'évolution des compétences et des carrières des agents entre IE et laboratoires
•  mise en concurrence des UE pour obtenir des contrats de prestations pour assurer leur équilibre budgétaire
•  « taylorisation» des activités et recours croissant à des travailleurs précaires pour les réaliser
•  affaiblissement des liens avec les Départements de recherche au profit d'un pilotage croissant par les Centres et la CNUE, conduisant à terme à la perte de la cohérence scientifique des stratégies.

Cette orientation vient à contre-courant de la reconnaissance internationale de la force et de l'originalité des équipes INRA. La qualité du dispositif INRA ne vient-elle pas en effet de la continuité entre la réflexion scientifique et l'expérience ? N'est ce pas sur le terrain et dans la confrontation avec lui que la connaissance du réel trouve ses bases les plus solides ? Le caractère scientifique et général des résultats établis à l'INRA ne procède-t-il pas de cette relation étroite entre expérimentateurs et modélisateurs, entre théoriciens et praticiens de la recherche agronomique ?

La vision de la DG selon laquelle la recherche scientifique pourrait être a priori divisée en tâches plus ou moins standard et modulables ne peut que produire des résultats attendus, visant à satisfaire les attentes illusoires d'un système d'innovation entièrement piloté par la recherche de la compétitivité des entreprises privées. Les questions scientifiques de notre temps attendent mieux de la recherche publique.

Selon nous, cette fuite en avant et cette parcellisation du travail, loin de rendre le dispositif plus efficace, empêcheront l'ensemble des agents de conduire ensemble des démarches expérimentales, tout en les obligeant à sacrifier à la simple gestion des équipements à moindres coûts et avec moins de personnels. Cette décision vient même à contre-courant des conclusions des évaluations de plusieurs UR en 2010-2011 (URH, UMR SENAH et UMR PL).

Tout ceci provoque le mécontentement des chercheurs, ingénieurs et techniciens qui subissent cette politique de séparation. Par exemple, 88 des 180 agents de l'UR Herbivores de Theix ont signé une lettre adressée à la DG pour demander un moratoire sur ces décisions, et dans d'autres Unités (UMRPL, UMR SENAH, GDEC, ASTER, UEICP, …) des oppositions existent qui n'ont pas encore une expression publique.

L'ensemble de cette politique vise explicitement à mettre les UE de l'INRA à disposition des centres de recherche européens. Etablissant des coûts complets d'expérimentation - salaires compris - la DG voudrait ainsi mettre sur le marché les Unités Expérimentales (2), marginalisant à terme les Unités de Recherche de l'INRA qui n'auraient pas les moyens de faire appel à elles.

 

Et dans le même temps, n'est-il pas frappant sur cette question centrale, de constater à nouveau l'absence totale de concertation avec nos partenaires de la recherche, qu'ils soient dans d'autres organismes ou dans des instituts techniques avec lesquels nous entretenons des relations de longue date ? N'y a-t-il pas une contradiction entre nos missions et cette caporalisation de la recherche qui de plus en plus se décide au septième étage de la rue de l'Université ?

 

La Commission Nationale des Unités Expérimentales (CNUE) étudiait autrefois des demandes de financement émanant des UEs et versait des aides ponctuelles. La DG a décidé d'en faire un instrument d'analyse et d'évaluation des UE, mais aussi de pilotage et de réorientation du dispositif expérimental (3) en vue d'en réduire le patrimoine, les moyens de fonctionnement et le personnel titulaire, tout en les mettant au service de l'industrie et en réduisant le rôle des Départements de recherche.

 

Nous demandons donc que soit mise en place une réflexion de fond pour repenser ensemble le rôle des IE et des UE (4) dans une perspective globale tenant compte d'une stratégie scientifique d'ensemble de l'Institut et de l'avenir du dispositif de R&D, perspective basée sur une connaissance du terrain et du contexte, adaptée à chaque situation.

C'est pourquoi, dans les Conseils (Scientifiques et de Gestion) des Centres et des Départements, nos élus demanderont qu'un débat scientifique large soit organisé pour construire une vision à long terme du statut de l'expérimentation à l'INRA et du dispositif qui mène à bien les protocoles de terrain. Nous demandons donc que ces Conseils organisent la consultation dans leurs domaines, que des échanges entre départements et centres soient établis. Nous continuerons aussi à porter cette question qui est un élément clé de la stratégie scientifique de l'INRA, lors des débats du Conseil Scientifique National ( voir la déclaration de nos 8 élus au CSN du 28 septembre 2011 ).

Nous demandons pour l'heure un moratoire sur la transformation des Installations Expérimentales en Unités Expérimentales ainsi que sur le regroupement des UE en plateformes de prestations de service, et un arrêt de la réduction des moyens pérennes et autonomes des Unités de Recherche (installations, personnel titulaire, soutien de base reconductible).

Nous appelons tous nos collègues, chercheurs et ITA, à soutenir cette démarche en se mobilisant dans leurs Unités et Centres, et dans les différents Conseils.

(1) Document de travail pour le CTP INRA du 26 mai 2011 : « La réalisation du schéma directeur sur l'optimisation des fonctions support doit apporter sa contribution à cet effort collectif de maîtrise de la dépense … les dépenses de fonctionnement courant sont d'abord celles des unités de recherche,…. »

(2) « L'établissement doit aussi faire évoluer son modèle économique.... Dans le même temps, il doit adapter son cadre de gestion contractuelle pour faire face à la montée en puissance de ce type de ressources et aux demandes de certains de ses bailleurs de fonds en matière de financements en coûts complets / …/ outils nécessaires au calcul et à la justification de tarifs de prestations au bénéfice de tiers pour certaines plateformes technologiques ou unités expérimentales  » (Projet de Contrat d'objectifs INRA 2012-2016, page 24)

(3) Ainsi une brochure récente de présentation de la CNUE (novembre 2011) indique : "Cette connaissance fondamentale (des IE/UE) doit lui permettre de répondre aux diverses sollicitations internes de la Direction générale, des Directeurs scientifiques ou des Chefs de département, pour des missions d'analyse ou d'expertise" … participer à la définition des modalités de gestion et de fonctionnement de l'outil expérimental (mise en place des CSU, commissions d'évaluation des UES à l'initiative des départements), - collaborer à des groupes de réflexion avec d'autres instances nationales, concernant les mises en sécurité ou en conformité, la gestion des risques professionnels, le cycle de vie des unités."

(4) Selon nous, ces deux dispositifs (IE et UE) sont complémentaires, contribuent à répondre à la diversité des missions et des objectifs de l'INRA et lui permettent de remplir pleinement son rôle d'institut de recherche publique autonome et finalisée, en acquérant des connaissances nouvelles et pour une première étape du transfert vers l'application des connaissances acquises.

 

 


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