La CGT-INRA s'adresse à tous les personnels travaillant à l'INRA

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Message du 15 septembre 2009
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Consultations ?

Vous avez bien dit consultations ?

Après avoir refusé au printemps, au mépris de toute démocratie, que les assemblées de personnels qu'elle avait convoquées ainsi que les conseils de départements et de centres puissent voter pour ou contre la mise en place du Consortium, la Direction Générale de l'INRA sort de sa manche, cet automne, des « consultations » tous azimuts.

Réunions de Directeurs d'Unité, Conseils de Centres, Conseils de départements, tout le monde est appelé à plancher, et surtout extrêmement vite (certains conseils étaient déjà convoqués la semaine dernière !), sur les 4 notes introductives des chantiers de réorganisation de l'Institut rédigées par le collège de direction suite au rapport « Houllier » (Mission de réflexion sur l'organisation et le pilotage de l'INRA - Internationalisation, Efficacité, Attractivité) : Devenir un acteur international ; Eclairer et anticiper : les fonctions d'expertise et de prospective ; Renforcer la capacité de programmation scientifique et de gestion des projets ; Réorganiser l'appui à la recherche au service des unités et des équipes. A cela s'ajoutent les 4 chantiers scientifiques du document d'orientation 2010-2014 (Vers une biologie et une écologie plus prédictives ; Adaptation au changement climatique ; Relance agronomique : convergence entre agronomie et écologie, systèmes innovants ; transitions alimentaires et durabilité).

Résultat exigé pour le 23 octobre pour les premiers et le 15 décembre pour les seconds, rien moins que cela ! A la clé, une perspective de large réorganisation structurelle de l'Institut pour 2010, cadrée par la mise en place du consortium- que nous continuons à dénoncer, de l'Alliance des Sciences de la Vie et de la Santé , et des contrats avec les universités autonomes issues de la Loi Pécresse (LRU). En corollaire, le mandat des chefs de département et des présidents de centre ne court que jusqu'à fin 2009.

 

La CGT-INRA dénonce cette précipitation et demande le report des consultations. Cependant, notre syndicat, entend ici fournir aux personnels des moyens pour tenter de décoder ce que recherche véritablement la Direction Générale au travers de cette opération, menée dans un langage le plus souvent technocratique et difficilement compréhensible. D'où ce message détaillé, et donc malheureusement très long, mais que nous invitons cependant à lire en totalité. Nous n'aborderons ici que les chantiers réorganisation, les chantiers scientifiques feront l'objet d'un mail ultérieur, mais ils sont néanmoins cadrés par les premiers (par ex : peut-on discuter de recherches sur le long terme en écologie prédictive dès lors que l'ensemble du financement se fait sur projets à très court terme ?)

 

Alors qu'elle a voulu étouffer toute opposition sur le consortium, sponsorisant même un site où seules les contributions « positives » étaient acceptées, la Direction Générale laisserait ici tout ouvert à la discussion ? Dans quel but ? Pouvoir puiser comme elle l'entend dans la multitude de points de vue qui remonteront, preuve de la diversité des agents INRA, pour trouver ce qui correspond à ses objectifs tout en arguant que cela provient du personnel ?

« Débattre » de mesures déjà décidées ?

Quoiqu'il en soit, chacun peut constater qu'avant même ce débat, la Direction Générale opère déjà des réorganisations drastiques de centres et services , avec des conséquences importantes pour les personnels (charge de travail, mobilités forcées) et unités. Fusion de centres comme à Angers-Nantes et Avignon-Sophia, fusion de SDAR pouvant préfigurer les fusions de centres à Orléans-Tours et demain à Dijon-Nancy-Colmar (?), rapprochement accéléré des SDAR INRA-CIRAD aux Antilles, …. Tout se passe comme si on allait vers un INRA fondé sur les régions et non plus structuré avant tout sur des départements planifiant les recherches au plan national. Le rapport Houllier indique clairement que ce processus de fusion « vise à donner une meilleure lisibilité régionale aux activités de l'Inra. Dans un contexte de réflexion de l'Etat sur les missions et les périmètres des collectivités territoriales et de polarisation des dispositifs, la question de l'amplification d'un tel mouvement se pose  » (Page 34).

En parallèle, on doit pointer que la Direction Générale , toujours avant même ce débat, tente de mettre en place, malgré les résistances à tous les niveaux y compris de certains chefs de département, la modulation des crédits pour départements et unités de recherches , fondée sur la suppression de la part- chercheur pour les chercheurs en alerte CSS et sur la politique incitative des départements notamment en matière de publications à fort facteur d'impact. La conséquence, c'est une individualisation complète des dotations des unités, avec à la clé l'exacerbation inéluctable de tensions entre unités. On a déjà des exemples dans certains départements à chefs zélés, où des unités se voient attribuer des dotations complémentaires de 20 000 euros en fonction du nombre de publications ciblées. Nous nous félicitons qu'à l'inverse toutes les organisations syndicales aient demandé l'arrêt de la modulation/ suppression de parts- chercheurs lors de la CAPN Chercheurs du 3 septembre.

Dire tout et son contraire pour que la Direction puisse choisir ce qui l'intéresse ?

Le rapport Houllier est certes amené à dire (Page 52) que «  sans que ce soit une règle générale ni que cela s'applique à tout type de recherche, ce sont des groupes de petite taille qui sont le plus souvent les plus créatifs (moins de 10 chercheurs, y compris les doctorants et les post-doctorants)  » et souligner l'importance de « la disponibilité, indépendamment de l'accès à des crédits compétitifs (de type appel à propositions), d'un noyau stable de ressources permettant d'envisager la réalisation du projet du groupe sur plusieurs années ». Ce qui va effectivement dans le sens de nos revendications syndicales sur la taille des unités - à l'opposé des TGU (Très Grandes Unités) - et sur le rétablissement du soutien de base comme base de fonctionnement des unités sur le long terme. Mais pour le fonctionnement, M. Houllier ajoute aussitôt une piste «  fondée sur l'incitation a posteriori, qui consisterait à abonder les ressources des unités quand elles obtiennent des financements compétitifs qui sont en adéquation avec leur projet tel que validé au moment de l'évaluation  ». (p 58). C'est-à-dire une modulation encore plus importante et encore plus de différenciation entre unités. Quelle « proposition » en tire la Direction ? Avancer vers la mise en place des TGU (Très Grandes Unités) et généralisation du fonctionnement sur projet au détriment du soutien de base pérenne des unités !

On voit poindre aussi la volonté de considérer les « coûts complets » pour les budgets des unités. Cela signifie prendre en compte les salaires des titulaires dans les budgets. Cette notion n'est pas nouvelle. C'est celle qui a été progressivement amenée avec les contrats européens (« feuilles de temps »). C'est surtout celle qui est en vogue dans le privé et dans les EPIC pour mesurer la « performance » en regard des coûts directs et indirects du travail. Le responsable de l'ANRT (Agence Nationale de la Recherche et de la Technologie), Denis Randet, ne s'en cache d'ailleurs pas : il veut au travers de cette mesure aligner les EPST sur le mode de fonctionnement des EPIC ! Il s'agit de pouvoir comparer les résultats d'une unité (publications, brevets, projets obtenus) avec « l'investissement » opéré en termes de coûts de personnels ! ... pour ensuite «  faire croître les meilleures équipes aux dépens des moins bonnes  (D. Randet, 5/06/2009)»,… et pourquoi pas tenter de sanctionner les agents dont la « performance » ne serait soi-disant pas en rapport avec le salaire ? L'autre intérêt pour ses initiateurs est que ce système aurait l'avantage de minimiser les disparités visibles liées à une modulation drastique du soutien de base, voire aider à le faire progressivement disparaître complètement.

Un INRA fondé essentiellement sur les projets ?

La note d'un des chantiers, « Renforcer la capacité de programmation scientifique et de gestion des projets », paraît concentrer les objectifs de la Direction Générale. Il y est en effet écrit que : «  L'option centrale choisie pour la réorganisation de l'INRA repose sur le renforcement de la place des programmes et des projets au sein de l'Institut, afin d'améliorer sa réactivité. ». Toute l'activité scientifique de l'institut devrait être structurée en programmes et projets (sauf exception type ressources génétiques, etc. mais sans précision de financement) avec pilotage et financement par projet afin "d'optimiser l'usage des ressources" et la réactivité de l'Institut. Quelques très grands programmes "directement liés aux priorités de l'Institut" (sans qu'on sache quelles sont ces priorités) seraient gérés directement par le collège de direction. Les départements n'auraient plus qu'un rôle d'animation scientifique de 1 ou 2 programmes de recherche et leur déclinaison en projets au niveau des unités. Si on réalise bien, la base des départements serait ainsi notablement resserrée avec un déport vers les centres de la majorité des personnels attachés au CD (adjoints divers et personnels d'appui). Suite à la réduction du nombre de départements par les réformes passées de l'INRA et des effets induits par le regroupement de disciplines ou d'objets de recherche souvent éloignés, les effectifs de personnels affectés aux départements avaient augmenté. Ils seraient désormais considérés comme « pléthoriques ». On parle de "cycle de vie des programmes et des projets ". Derrière la volonté de corriger la perte d'énergie des unités et chercheurs à la recherche de financements sur projets et la dispersion scientifique qui en découle, on peut donc craindre que les unités n'aient plus aucune liberté de programmation scientifique.

Le chantier "Réorganiser l'appui à la recherche au service des unités et des équipes" en découle, avec le langage du privé, patronal, omniprésent (à noter que des cabinets privés d'audit sont à l'œuvre sur ces questions et passent dans les centres comme le cabinet KPMG). Il faudrait ainsi "une forte évolution des missions dévolues aux départements qui auront à animer des programmes et à assurer le suivi de projets d'unités", et donc il faudrait les "décharger d'une grande partie des tâches de gestion". Pour cela les Centres auraient "un rôle accru en matière d'appui à la recherche, au service des unités et équipes". Concrètement, tous les agents en charge de l'appui à la recherche (GRH, finances, communication, valorisation, infrastructures,…) seraient affectés dans les SDAR par centre ou groupe de centres et ne dépendraient plus des départements ou des unités. Nous avions, à l'époque dénoncé le passage à la gestion des catégories B et C par les présidents. Cela signifierait désormais que les catégories A le seraient aussi.

Par ailleurs les unités, transformées en "maîtres d'ouvrages scientifiques", passeraient des "contrats" avec les services d'appui de centre qui eux-mêmes seront des "maîtres d'oeuvre de l'appui à la recherche" ! Renforcement et développement de S2I et mise en place d'une comptabilité analytique pour gérer les projets (on est dans la LOLF ).

L'un des motifs serait louable : "limiter le temps consacré par les scientifiques aux tâches d'appui à la recherche" mais cela risque de faire très mal, non seulement pour les agents chargés de l'appui à la recherche (mobilité forcée, changement de l'organisation du travail, etc.) mais également pour les autres avec un éloignement de leurs fonctions, un changement des rapports, etc. C'est très exactement ce qui est en train se passer avec les fusions de SDAR inter-centres.

De plus, si on regroupe les fonctions d'appui au niveau des centres, pourquoi demain ne pas les mutualiser avec les universités et autres partenaires du Consortium ? Là encore, c'est exactement ce qui se passe avec la tentative de rapprochement des services entre le CRAAG et le Cirad aux Antilles. Compte-tenu de la diminution des effectifs administratifs en général et de la charge déjà (trop) lourde de travail sur ces personnels (S2I, etc.), la mise en place de contrats ne peut pousser qu'à l'externalisation et/ou à l'emploi massif de précaires.

Que dire rapidement des autres chantiers ?

Celui appelé «  Devenir un acteur international  » découle largement du Consortium : bien que le constat du rôle international de l'Inra soit positif, il n'est question que d'être encore plus « performant » en modifiant le fonctionnement de l'Inra, sans jamais préciser pour quels objectifs (si, bien sûr, l'adaptation au changement climatique ; il n'est même plus question de lutter contre) ni avec quels partenaires étrangers. Seule la "Méditerranée" est cité comme prioritaire, alliance avec le Cirad oblige. Le discours est le même que pour le Consortium : il faut être visible à l'international pour ramasser plus d'argent, capter les meilleurs étudiants et chercheurs et ne pas laisser la Chine et le Brésil occuper la scène internationale en matière de formation et de recherche agronomique ! Aucune remise en cause du système actuel de relations Nord-Sud ni de la mondialisation (" contribution de l'Inra à la compétition socio-économique mondiale "). Il est même clairement écrit qu'il faut développer nos relations avec les grandes fondations "Bill et Melinda Gates, Rockfeller, Tata,...". La question qui est posée aux conseils se résume ainsi à "comment mieux vendre l'Inra à l'international ?".

Pour "Eclairer et anticiper : les fonctions d'expertise et de prospective ", il s'agit des relations recherche-société avec comme exemple positif le Grenelle de l'Environnement. Il s'agit d'inciter les agents à mieux répondre aux demandes de la société, comprenez l'agrobusiness. Pas de détail précis mais la perspective est celle d'un tournant conséquent d'un Institut de recherche vers les activités d'expertise, prospective et valorisation. A moyens en diminution, cela ne peut signifier que détourner des moyens de l'activité de recherche proprement dite.

D'une façon générale, on sent une volonté de recentrage sur un petit nombre de projets et de centres ("éviter la dispersion", "mutualiser", etc.). Cadré également par la volonté d'économies budgétaires, un tel processus a toutes les chances de se traduire, au nom de la « mutualisation », en termes de fusions multiples (services, départements, centres) et de mobilités, thématiques comme géographiques, pour les personnels. Il s'agit pour l'Inra de rentrer dans le moule du Consortium et donc de se déposséder de certaines parties pour les laisser à nos partenaires. On perçoit également la main mise croissante du collège de Direction qui aura seule la "gouvernance de la politique européenne et internationale " (thème 1) et celle de grands programmes (thème 3). L'incitation est omniprésente (sans précision mais on pense aux plans Carrières de V. Pécresse et ses rémunérations au mérite).

Pour être cohérente avec son souci affiché de consultations, alors la Direction Générale doit laisser les conseils libre de voter sur ce qui leur paraît essentiel pour assurer la pérennité et le développement de l'INRA comme celui de ses agents. La CGT-INRA sera présente lors de ces discussions et encourage d'ores et déjà tous les agents et tous les conseils à se prononcer sur des mesures concrètes à l'occasion de ces réunions.

Ces mesures pourraient être :

  • Le soutien de base attribué aux unités doit redevenir la base de fonctionnement pour une recherche à long terme. Pour cela il doit être notablement augmenté, en particulier en ré-attribuant les sommes aujourd'hui versées à l'ANR

  • La modulation des crédits sous toutes ses formes (retrait part-chercheur, politique incitative, bonus à la publication,…) doit être abandonnée et les dotations doivent être calculées uniquement sur la base des effectifs

  • Non au décompte des crédits à coût complets, le fonctionnement de l'INRA n'est pas celui d'un EPIC, il doit rester celui d'un EPST

  • Un INRA fondé sur le financement par projets n'est pas viable, arrêt du financement des recherches sur projet (hors et au sein de la dotation de l'Etat)

  • Assez de concentration-fusion de SDAR entre centres et fusion de Centres, l'organisation de l'INRA doit garantir la présence de personnels d'appui à la recherche à tous les niveaux à proximité géographique des unités

  • Non au rapprochement structurel de services INRA-CIRAD, organismes à statuts différents

  • Non à la mutualisation locale des personnels avec les universités et les partenaires du consortium, qui ne visent qu'à des économies d'échelle

  • Le nombre de départements a déjà trop diminué, avec des conséquences constatées par la DG elle-même. Ce processus doit s'arrêter et les départements conserver l'ensemble de leurs prérogatives scientifiques et de gestion

  • Les catégories A doivent toujours relever d'une gestion au niveau du département.

  • Abrogation du décret instituant les primes individuelles d'excellence et revalorisation générale des salaires sur la base de l'augmentation du point d'indice.

Réaction à l'article " Comment gouverne... la tête chercheuse de l'INRA et Polytechnique " (article paru dans Challenges le 27/08/09)

Le Bureau National de la CGT-INRA a écrit au rédacteur de cet article :

Monsieur,

Ayant pris connaissance de l'article «Comment gouverne… la tête chercheuse de l'INRA et Polytechnique», pour lequel vous aviez interviewé l'élu CGT au Conseil d'Administration, c'est d'abord avec stupeur, puis avec un certain agacement, que nous avons pu lire sous votre plume que « alors qu'au CNRS ces réformes ont suscité une tempête sociale, à l'INRA, elles sont passées sans un jour de grève» ! Les salariés de l'Institut à qui ont été retenues des journées de salaire pour s'être mis en grève afin, notamment de venir manifester à Paris à l'appel des syndicats de l'INRA pour tenter d'empêcher que le Conseil d'Administration n'approuve la création du Consortium, apprécieront.

Pour rétablir la vérité sur cette soi-disant absence de réaction du personnel , nous vous joignons le communiqué que nous avons envoyé à toute la presse à la suite de cette action, qui montre que Mme la Présidente de l'INRA n'a pu faire passer son projet que sous la protection de la police, et au travers d'un stratagème identique à celui employé au CNRS: déplacer à la dernière minute le lieu de la réunion. Nous vous précisons que les syndicats CGT, CFDT et SUD de l'INRA ont déposé un recours en annulation de la délibération auprès du Tribunal Administratif de Paris.

Libre à vous de porter ou non cette mise au point à la connaissance de vos lecteurs, mais nous espérons que votre conception de l'exercice de votre profession vous y conduira.

Recevez nos salutations syndicalistes.

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